LETTRE N°43 – RÉINCARNATION ET IDÉES INNÉES
Septembre – Octobre 2018
La prochaine Lettre paraîtra début novembre 2018. Elle aura pour thème : Intelligence humaine et intelligence artificielle.
Audio : Conférence « L’inné et l’acquis dans l’incarnation des âmes ». Écouter l’audio sur YouTube (Chaine : Conférences Théosophiques).
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PENSÉE DU MOMENT
« Le Phèdre de Platon expose tout ce que l'homme fut une fois et ce qu'il peut encore devenir. "Avant que l'esprit de l'homme soit tombé dans la sensualité et qu'il se soit incorporé en elle par la perte de ses ailes, il vivait parmi les dieux dans le monde aérien [spirituel] où tout est vrai et pur." Dans le Timée il dit que "il fut un temps où l'humanité ne se reproduisait pas, mais où elle vivait comme des esprits purs". Dans le monde à venir, dit Jésus, "ils ne se marient ni ne sont donnés en mariage", mais, "ils vivent comme les Anges de Dieu dans le Ciel". (Isis Dévoilée, ed. Adyar, II, 385/6 – Isis Unveiled, II, p. 354)
« Dis-lui, ô aspirant, que la véritable dévotion pourra lui ramener la connaissance, cette connaissance qui fut sienne dans les incarnations passées. La vue-deva et l'ouïe-deva ne sont pas obtenues en une seule et brève naissance. » (H.P. Blavatsky, La Voix du Silence, p. 55).
« Celui qui est parfaitement consacré verre, dans le cours des temps, la connaissance spirituelle, jaillir spontanément en lui. » (La Bhagavad-Gîtâ, ch. IV, v. 38).
CŒUR DE LA THÉOSOPHIE
La réincarnation et les idées innées
La doctrine de la réincarnation et de la perfectibilité humaine
« Pourquoi donc l'univers existe-t-il, et pour quel but final l'homme, le penseur immortel, évolue-t-il ici-bas ? Tout est pour l'expérience et l'émancipation de l'âme, dans le but d'élever la masse entière de matière manifestée jusqu'à la stature, la nature et la dignité de la divinité consciente. Le grand but est d'atteindre à la soi-conscience, non par l'entremise d'une race, d'une tribu ou d'une nation privilégiée, mais par le perfectionnement graduel - après transformation - de toute la masse de matière comme de ce que nous appelons maintenant âme. Rien n'est, ni ne sera laissé de côté. Le but pour l'homme actuel est son initiation à la connaissance complète et, pour les règnes qui lui sont inférieurs, leur élévation progressive de stade en stade, afin qu'eux aussi soient initiés en leur temps. Telle est l'idée d'évolution dans toute sa puissance et c'est une perspective magnifique ; elle fait de l'homme un dieu, et donne à tout ce qui fait partie de la nature la possibilité d'atteindre un jour ce même état. Il y a de la force et de la noblesse en cette idée, car aucun homme n'en est amoindri ou rabaissé, et nul n'est originellement si grand pécheur qu'il ne puisse s'élever au-dessus de tout péché. Considérée du point de vue matérialiste de la science, l'évolution n'embrasse que la moitié de la vie, tandis que la conception religieuse de l'évolution est un mélange de non-sens et de crainte. Les religions actuelles maintiennent un climat de crainte et s'imaginent en même temps qu'un Être Tout-Puissant ne pourrait penser qu'à notre terre et qu'il lui faudrait, de plus, la gouverner très imparfaitement. Mais l'ancienne doctrine théosophique conçoit l'univers comme un vaste ensemble complet et parfait » – W.Q. Judge, L’Océan de Théosophie, pp. 64-5.
« C'est le but de l'ancienne philosophie de restituer cette doctrine à toutes les religions qui l'ont perdue ; c'est pourquoi nous l'appelons " l'accord perdu du christianisme " ». « C'est la plus noble de toutes les doctrines ; elle seule, avec celle de karma, sa compagne fournit une base pour l'éthique. » – W.Q. Judge,L’Océan de Théosophie, pp. 69 et 92.
Qu’est-ce qui se réincarne ?
Ce qui se réincarne dans l'homme n’est pas la personnalité éphémère et changeante, mais l’individualité, l’Ego [l'Âme] spirituel qui recueille de chaque expérience terrestre l’arôme de ses expériences spirituelles et progressivement évolue vers un état divin. Voici quelques extraits de La Clef de la Théosophie, d’H.P. Blavatsky :
Qu'est-ce qui se réincarne selon la Théosophie ? « C’est l'Ego Spirituel et pensant, le principe permanent dans l'homme, ou ce qui est le siège de Manas [le Penseur]. Ce n'est pas Âtma [l'Esprit] – ni même Âtma-Buddhi [Esprit-Âme Spirituelle], envisagé comme la Monade dans sa dualité – qui est l'homme individuel ou divin, mais Manas ; car Âtman est le TOUT Universel et ne devient le SOI SUPÉRIEUR de l'homme qu'en conjonction avec Buddhi, son véhicule, qui L'unit à l'individualité (ou l'homme divin). C'est en effet le Buddhi-Manas qui est appelé le corps causal (les 5e et 6e principes unis) et qui est la Conscience, qui relie l'homme individuel à chaque personnalité qu'il habite sur terre. Ainsi, en prenant l'Âme comme un terme générique, il existe dans l'homme trois aspects de l'Âme : l'Âme terrestre ou animale, l'Âme Humaine, et l'Âme Spirituelle ; elles ne sont à proprement parler qu'une seule Âme sous ses trois aspects. Or, du premier rien ne subsiste après la mort ; quant au second (noûs, ou Manas), seule survit son essence divine, si elle n'a pas été souillée ; et pour ce qui est du troisième – en dehors du fait qu'il est immortel – il devient consciemment divin en s'assimilant le Manas supérieur. » « À propos des Ego qui se réincarnent (les âmes rationnelles) et dont la dernière personnalité est vouée à disparaître entièrement, il y est dit : « Toutes les âmes qui se sont détournées du Saint dans les cieux – béni soit Son nom – se sont jetées elles-mêmes dans l'abîme au péril de leur existence même et ont anticipé l'heure marquée pour descendre une fois de plus sur la terre ». Le « Saint » veut dire ici, ésotériquement, l'Âtman, ou Âtma-Buddhi » – pp. 136/7, 128.
Le perfectionnement progressif et graduel de l’être : « Par sa logique, sa cohérence, sa philosophie profonde, sa miséricorde et son équité divines, cette doctrine de la réincarnation n'a pas son égale au monde. C'est une croyance dans un progrès perpétuel de tout Ego ou âme divine qui se réincarne, dans une évolution qui va de l'extérieur vers l'intérieur, depuis le matériel jusqu'au spirituel et qui conduit, à la fin de chaque étape, à une unité absolue avec le Principe divin. S'élever d'un état d'énergie à un autre, passer de la beauté et de la perfection d'un plan à la beauté et à la perfection encore plus grandes d'un autre plan, parvenir à des niveaux toujours plus élevés de gloire, de connaissance et de puissance à chaque nouveau cycle, telle est la destinée de tout Ego, qui devient ainsi son propre Sauveur dans chaque monde, et à chaque incarnation. » – p. 170.
« Il faut considérer [l’Âme spirituelle, l’Ego supérieur] comme réelle par le fait même que la Monade éternelle, immuable et immortelle l'habite, alors que, pour la vie terrestre, l'Ego qui se réincarne doit se revêtir d'habits nouveaux, qui sont entièrement différents de ceux de ses incarnations passées et en qui tout, à l'exception de son prototype spirituel, est condamné à subir un changement si radical qu'il n'en reste aucune trace. » – p. 181.
« Le principe qui se réincarne, ou ce que nous appelons l'homme divin, est indestructible pendant toute la durée du cycle de vie [la durée d'un univers] : indestructible non seulement en tant qu'entité pensante, mais même en tant que forme éthérée. » – p. 191.
La réincarnation est le long pèlerinage obligatoire de toutes les âmes : « Notre Ego qui se réincarne était à son origine un Dieu, comme l'étaient toutes les émanations primordiales du Principe Un et Inconnu. Mais, comme il a été forcé, depuis sa « chute dans la Matière », de s'incarner pendant toute la durée du cycle, à intervalles successifs, du début jusqu'à la fin, ce n'est plus un dieu libre et heureux, mais un pauvre pèlerin qui va son chemin pour recouvrer ce qu'il a perdu. Cette explication sera plus complète si je rappelle ici ce qui a été dit au sujet de I'HOMME INTÉRIEUR dans Isis Dévoilée (édition anglaise originale Vol. II, p. 593) : Depuis l'Antiquité la plus reculée le genre humain, pris dans son ensemble, a toujours été convaincu de l'existence d'une entité spirituelle et personnelle dans l'homme physique personnel. Cette entité intérieure était plus ou moins divine suivant son degré de proximité avec la couronne. Plus cette union était intime, plus la destinée de l'homme était sereine, et moins les conditions extérieures étaient dangereuses. Une telle croyance n'est ni de la bigoterie ni de la superstition, mais un sentiment instinctif toujours présent de la proximité d'un autre monde spirituel et invisible, qui, bien que subjectif pour les sens de l'homme extérieur, est parfaitement objectif pour l'ego intérieur. » – pp. 195-6.
Une double évolution physique et spirituelle de tout dans l’univers
« Dès que nous postulons l'existence d'une double évolution physique et spirituelle, il nous faut aussi admettre qu'elle ne peut se réaliser que par la réincarnation. En fait cela est mis en évidence par la science. Elle montre que la matière de la terre et de toutes les choses physiques qui s'y trouvent fut, à une certaine période, soit gazeuse, soit en fusion ; puis qu'elle se refroidit, se transforma, et qu'enfin l'immense variété des êtres et des choses fut produite par ces changements et évolutions de la matière. Sur le plan physique cela correspond à la transformation d'une forme en une autre. La masse totale de matière est à peu près la même qu'au début de la formation de ce globe, avec en plus une minime quantité de poussière sidérale. Elle a donc dû changer maintes et maintes fois et avoir été physiquement remaniée et réincorporée. Bien entendu, pour être strictement exacts, nous ne pouvons pas employer le mot réincarnation, car « incarner » se rapporte à la chair. Disons donc « réincorporer », nous voyons alors que la matière, aussi bien que l'homme, a subi un changement constant de formes, et ceci est « la réincarnation », au sens large du terme. Quant à la masse totale de matière, la doctrine enseigne qu'elle sera élevée à l'état humain quand l'homme aura lui-même progressé. Après avoir atteint le salut final, l'homme ne laissera pas de résidu, qu'il faudrait éliminer d'une façon mystérieuse, ou faire disparaître dans quelque lointain dépotoir de la nature. La vraie doctrine n'admet rien de semblable, et en même temps ne craint pas de dire la véritable destination de ce qui semblerait être un déchet. Tout est complètement remanié en des états différents car cette philosophie enseigne qu'aucune matière, quelle qu'elle soit, n'est inorganique, mais que chaque atome est vivant et qu'il possède le germe de la soi-conscience, il doit s'ensuivre qu'un jour tout aura subi des transformations. Ainsi, ce qui est appelé actuellement de la chair humaine fut jadis de la matière entièrement minérale, plus tard végétale, et maintenant affinée en atomes humains. A un certain moment, dans un avenir très lointain, la matière végétale actuelle se sera élevée au stade animal et ce qui constitue maintenant notre matière organique, notre chair, se sera transformé, au cours de l'évolution, en penseurs soi-conscients. Ceci se poursuivra tout au long de l'échelle, jusqu'au moment où la matière actuellement connue comme minérale, aura passé au stade humain et de là à celui du penseur. » – W.Q. Judge, L’Océan de Théosophie, pp. 65-6.
En complément et pour être plus préci, au niveau de l'Homme il est enseigné qu'il participe de trois schémas évolutifs qui sont inéxtricablement entrelacés et mélangés. L'article « Qu'est-ce que l'Homme ? », donne des précisions sur cet aspect de l'enseignement.
Cette double évolution à l’œuvre dans l’univers, rappelle que deux principes de causalité agissent ensemble : la causalité matérielle(relative à la substance), et la causalité efficiente (relative à la conscience ou l’esprit). Certains mystiques ont témoigné de cette évolution double à l'œuvre dans l'univers, comme par exemple Maître Eckhart, « La nature commence son œuvre par ce qu'il y a de plus infime, alors que Dieu commence son œuvre par ce qu'il y a de plus parfait » (v. Traité et sermons, GF Flammarion, p. 182).
Les lois des cycles, de réincarnation et de karma
« Étant la grande loi de la vie et du progrès, la réincarnation est inextricablement liée aux lois des cycles et de karma. Ces trois lois œuvrent ensemble et, en pratique, il est presque impossible de démêler la loi de la réincarnation de la loi cyclique. C'est en vagues définies que les individus et les nations reviennent sur terre à des périodes cycliques régulières, ramenant ainsi sur notre globe les arts, la civilisation et les êtres mêmes qui jadis, sur ce globe, en furent les artisans. Étant donné que les entités d'une nation et d'une race sont liées entre elles par des liens puissants et invisibles, elles se rassemblent à différentes époques dans leur marche lente mais sûre pour former maintes et maintes fois des races et des civilisations nouvelles, à mesure que les cycles parcourent leurs rondes telles qu'elles sont fixées par la loi. Aussi les âmes qui firent les plus anciennes civilisations réapparaîtront, ramenant avec elles, dans son idée et son essence, l'ancienne civilisation, qui, en venant s'ajouter à ce qui a été fait par d'autres pour le développement du caractère et de la connaissance de la race humaine, produira une civilisation nouvelle et plus élevée. Ce développement nouveau et supérieur ne sera pas dû à des livres, à des annales, aux arts ou à la mécanique car, comme le prouve l'observation, tout cela est périodiquement détruit ; mais, l'âme conservant toujours en Manas la connaissance acquise et poussant sans cesse au développement de plus en plus complet des principes et des pouvoirs supérieurs, l'essence du progrès subsiste et se manifestera aussi sûrement que le soleil luit. Et, c'est au long de cette route que se trouvent les points qui marquent le moment où les cycles mineurs et majeurs des Avatars font apparaître, pour le bien de l'humanité, les grands personnages qui, d'âge en âge, remodèlent la race. » – W.Q. Judge,L’Océan de Théosophie, pp. 126/7.
« La réincarnation ne signifie pas que nous transmigrons dans des formes animales après la mort, comme le pensent certains peuples de l'Orient. " Une fois un homme, toujours un homme ", tel est l'adage de la Grande Loge. » – W.Q. Judge, L’Océan de Théosophie, p. 71.
Suivant le concept théosophique, le poème de la Bhagavad-Gîtâ, « enseigne qu'une double ligne d'évolution est en nous ». Deux camps sont en conflit : « les Kuru représentent l'aspect le plus matériel [la partie inférieure de notre nature et qui est développée la première], tandis que les princes Pândava, dont Arjuna fait partie, symbolisent le côté spirituel du courant [et ils représentent les aspects les plus spirituels de notre nature] ; [le combattant, héro] Arjuna représente l'Étincelle immortelle [ou l’Ego immortel, la monade, en nous-même]. Krishna symbolise le Logos, ou l’instructeur spirituel. – W.Q. Judge, La Bhagavad-Gîtâ, Préface.
« Dans l'évolution des individus isolés, dans l'évolution du monde organique, dans celle de l'Univers, comme dans la croissance et le développement de notre planète – en somme, partout où se produit un processus de complexité progressive – nous trouvons, indépendamment de la transition de l'unité à la pluralité, et de l'homogénéité à l'hétérogénéité, une transformation inverse – la transition de la pluralité à l'unité, de l'hétérogène à l'homogène. ». « Dans ce cas, la nature matérielle ne fait que reproduire la loi qui agit dans l'évolution du psychique et du spirituel : tous deux descendent pour remonter après, et s'unir à leur point de départ. La masse homogène en formation, ou l'élément différencié en ses parties, se transforme graduellement en une masse hétérogène ; puis, unissant ces parties en un tout harmonieux, elle recommence un processus inverse, ou réinvolution, et retourne graduellement à son état primitif ou primordial. » – H.P. Blavatsky, extrait de l’article « L’origine du mal » (Cahier Théosophique n°72, p. 16).
Les idées innées
« Les sages expliquent que le fait que certaines idées soient communes à la race [= l'humanité] entière est dû à la réminiscence de ces idées qui furent implantées dans le mental humain tout au début de sa carrière évolutive sur cette planète par les frères et les sages qui avaient appris leurs leçons et atteint leur perfection dans des âges antérieurs, bien avant que ne commençât le développement de ce globe. La science ne nous offre aucune explication pour ces idées inhérentes, elle se contente de dire qu'« elles existent ». En fait, elles furent enseignées à la masse des Egos engagés dans l'évolution de cette terre ; elles furent gravées, marquées en caractères de feu dans leur nature et reviennent toujours à la mémoire ; elles suivent l'Ego à travers le long pèlerinage. » – W.Q. Judge, L’Océan de Théosophie, p. 92.
Considérations théosophiques sur l’importance des idées spirituelles
La note jointe « L’importance des idées spirituelles » (sommaire : L'Idée Divine de Platon - Les symboles - L'univers se développe à partir de l'idée divine - Les Idées et les Nombres - De l'éternité des idées) est un extrait de passages d’écrits théosophiques sur le rôle essentiel des idées pour l’homme.
LA CHRONIQUE (PASSÉ, PRÉSENT, FUTUR)
L’origine des idées innées
Le mythe des Cabires et de Prométhée
« Ainsi, tandis qu'en Samothrace et dans les plus anciens temples égyptiens, les Cabires étaient les Grands Dieux Cosmiques – les sept et les quarante-neuf Feux Sacrés – leur culte devint, dans les temples grecs, en grande partie phallique et, par suite, obscène aux yeux du profane. Dans ce dernier cas, ils étaient trois et quatre, ou sept – les principes mâle et femelle – la croix ansée. Cette division explique pourquoi certains auteurs classiques les considéraient comme n'étant qu'au nombre de trois, tandis que d'autres en énuméraient quatre. […] D'autres, qui avaient également raison à leur manière, soutenaient qu'il n'y avait que deux Cabires. Ceux-ci étaient, au point de vue ésotérique, les deux Dioscures, Castor et Pollux et, au point de vue exotérique, Jupiter et Bacchus. Ils personnifiaient tous deux, au point de vue géodésique, les pôles terrestres ; au point de vue astronomique, le pôle terrestre et le pôle du ciel et aussi l'homme physique et l'homme spirituel. L'histoire de Sémélé et de Jupiter et la naissance de Bacchus, Bimater, avec toutes les circonstances qui s'y rapportent, n'a besoin que d'être lue ésotériquement pour que l'allégorie soit comprise. Les rôles joués dans cet événement par le Feu, l'Eau, la Terre, etc., suivant les nombreuses versions, montrera comment le "Père des Dieux" et le "joyeux Dieu du Vin" furent amenés à personnifier aussi les deux pôles terrestres. Les éléments tellurique, métallique, magnétique, électrique et igné, constituent autant d'allusions et de références au caractère cosmique et astronomique de la tragédie diluvienne. En Astronomie, les pôles sont en vérité des "mesures célestes", comme le sont les Cabires-Dioscures, ainsi que nous le démontrerons, et les Cabires-Titans à qui Diodore attribue "l'invention du Feu" [Le mot guebra vient de Kabiri (Gabiri) et désigne les anciens adorateurs du feu, Perses ou Parsis. Kabiri fut transformé en Gabiri et resta le terme qui désignait les Zoroastriens en Perse. (Voyez De Religione Persarum, de Hyde, c. 29.)] et l'art de manufacturer le fer. De plus, Pausanias [1, IX, 751] montre que la divinité Cabirique originale était Prométhée.
« Toutefois, le fait que les Titans-Cabires étaient aussi, au point de vue astronomique, les Générateurs et Régulateurs des Saisons et, au point de vue cosmique, les grandes Energies Volcaniques – les Dieux qui gouvernaient tous les métaux et toutes les œuvres terrestres – ne les empêche nullement d'être, sous leur aspect originel divin, les Entités bienfaisantes qui, symbolisées par Prométhée, apportèrent la lumière au monde et douèrent l'Humanité d'intellect et de raison. Ce sont, surtout, dans toutes les Théogonies – principalement dans celle des Hindous – les Feux Sacrés Divins au nombre de Trois, Sept ou Quarante-neuf, suivant les exigences de l'allégorie. Leur nom seul le prouve, car ce sont les Agnipoutra, ou Fils du Feu, aux Indes, et les Génies du Feu, sous divers noms en Grèce et ailleurs. Welcker, Maury et maintenant Decharme montrent que le nom de kabeiros veut dire "le puissant par le feu" et dérive du verbe grec χαίω "brûler". Le mot sémitique de kabirim contient l'idée "de fort, de puissant et de grand" qui répond aux mots grecs μεγαλοι δυνατί, mais ce sont là des épithètes plus récentes. Ces Dieux étaient les objets d'un culte universel et leur origine se perd dans la nuit des temps ; mais qu'ils fussent invoqués en Phrygie, en Phénécie, en Troade, en Thrace, en Egypte, à Lemmos ou en Sicile, leur culte se rapportait toujours au Feu, leurs temples étaient toujours édifiés dans les localités les plus volcaniques et dans le culte exotérique ils faisaient partie des Divinités Chthoniennes, aussi le Christianisme en a-t-il fait des Dieux Infernaux.
« Ce sont vraiment "les Dieux, grands, bienveillants et puissants", comme les appelle Cassius Hermone [Voyez Macrob, Sat., I, III, c. 4, p. 376]. A Thèbes, Corê [Korê ou Perséphone] et Déméter, les Cabires avaient un sanctuaire [Pausan., IX. 22 ; 5.] et, à Memphis, les Cabires avaient un temple si sacré qu'il n'était permis à personne, sauf aux prêtres, d'entrer dans son enceinte sacrée [Hérodote, III, 37]. Toutefois, nous ne devons pas perdre de vue, en même temps, ce fait que le titre de Cabire était générique ; que les Cabires, les Dieux puissants en même temps que mortels, étaient des deux sexes et étaient aussi terrestres, célestes et cosmiques ; que, tandis qu'en leur qualité cosmique de régents des puissances sidérales et terrestres, c'était un phénomène purement géologique – tel qu'on le considère maintenant – qui était symbolisé en leur personne, ils furent aussi, à l'origine des temps, les Régents de l'Humanité, lorsque incarnés comme Rois des "Dynasties Divines", ils donnèrent la première impulsion à la civilisation et orientèrent le mental dont ils avaient doté les hommes, en vue de l'invention et du perfectionnement de tous les arts et de toutes les sciences. Aussi, l'on dit que les Cabires apparurent en qualité de bienfaiteurs des hommes et, en cette qualité vécurent pendant des siècles, dans la mémoire des nations. C'est à ces Cabires ou Titans qu'est attribuée l'invention des lettres (le Déva-nâgari, ou alphabet et langage des Dieux), de la législation, de l'architecture et aussi des différents modes de la prétendue magie et de l'emploi médical des plantes. Les noms d'Hermès, d'Orphée, de Cadmus, d'Asclepios, de tous ces Demi-dieux et Héros auxquels on attribue la révélation des sciences aux hommes et en qui Bryant, Faber, l'évêque Cumberland et tant d'autres écrivains Chrétiens – trop zélés pour se contenter de la simple vérité – voudraient forcer la postérité à ne voir que des copies païennes d'un unique prototype, du nom de Noé – sont tous des noms génériques.
« C'est aux Cabires que l'on attribue la révélation du grand bienfait de l'agriculture, par la production du blé ou froment. Ce qu'Isis-Osiris, la vivante Cabiria, fit en Egypte, Cérès le fit, dit-on, en Sicile ; tous appartiennent à une même classe. » – H.P. Blavatsky, La Doctrine Secrète, traduction Adyar – Vol. II, pp. 362-364, de l’éd. anglaise originale The Secret Doctrine.
Quelques brefs extraits du Prométhée enchaîné d'Eschyle : « J'ai mis fin aux terreurs que la vue de la mort cause aux mortels. [...] J'ai logé en eux d'aveugles espérances. [...] D'enfants qu'ils étaient auparavant j'ai fait des êtres doués de raison et de réflexion. [...] Je leur ai donné le feu ... ils apprendront de lui beaucoup d'arts ... fabriquer des maisons de briques ... travailler le bois ... j'inventais pour eux la plus belle de toutes les sciences, celle des nombres, et l'assemblage des lettres ... tous les arts des mortels viennent de Prométhée ... » (extraits du Théatre complet, d'Eschyle, GF Flammarion).
L’origine divine de l’homme et de la dévotion
« À ses tout premiers débuts, l'intelligence psychique et physique étant en sommeil, et la conscience encore non développée, les conceptions spirituelles de cette race [des origines] étaient complètement sans rapport avec son environnement physique.
« Cet homme divin résidait dans sa forme animale - même si elle avait une apparence extérieure humaine ; et s'il y avait de l'instinct en lui, aucune conscience réfléchie (ou soi-conscience) ne venait éclairer la ténèbre du cinquième principe [manas - la base du mental dans l'être humain] encore latent. Lorsque, mus par la loi d'Évolution, les Seigneurs de Sagesse infusèrent en lui l'étincelle de la conscience, le premier sentiment qu'elle éveilla à la vie, et à l'activité, fut un sens de solidarité, d'unité (fusionnelle) avec ses créateurs spirituels. De même que le premier mouvement intérieur de l'enfant est pour sa mère et sa nourrice, de même les premières aspirations de la conscience s'éveillant dans l'homme primitif furent pour ceux dont il ressentait l'élément en lui-même et qui pourtant étaient extérieurs, et indépendants, par rapport à lui. La DÉVOTION naquit de ce sentiment et devint le premier moteur dominant dans sa nature ; car c'est le seul qui soit naturel dans notre cœur, qui soit inné en nous, et que nous trouvions aussi bien dans le tout jeune enfant humain que dans le petit animal. Ce sentiment d'aspiration instinctive, que rien n'aurait pu réprimer dans l'homme primitif, a été évoqué par Carlyle en termes pleins de beauté et, dirait-on, inspirés par une véritable intuition [...] [Carlyle - Past and Present (1874), p.IO4] « Ce grand cœur antique, comme c'est celui de l'enfant dans sa simplicité, celui de l'homme dans sa pure solennité et sa profondeur ! Où qu'il aille sur la Terre, le Ciel est là, au-dessus de sa tête. Il fait pour lui-même, de toute la Terre, un temple mystique, de toute démarche terrestre, une sorte de culte. Des créatures de lumière passent comme des éclairs dans le soleil du jour, et voici que là-bas passent des anges, messagers de Dieu parmi les hommes... Merveille, miracle, entourent l'être humain ; il vit dans un élément de miracle ». […] Ce qui était naturel aux yeux de l'homme primitif est devenu seulement de nos jours miracle pour nous ; et ce qui, pour lui, était un miracle ne pourrait jamais s'exprimer dans notre langue. » - H.P. Blavatsky, La Doctrine Secrète, p. 210, éd. originale anglaise.
ARTICLES ET DOCUMENTS
Il est proposé à la lecture (pour en savoir plus) :
- Note : « L’importance des idées spirituelles », extraits d’écrits théosophiques.
- H.P. Blavatsky, article « Dialogue sur les mystères de l’au-delà » (la constitution de l’homme intérieur) (Cahier Théosophique n°59).
- William Q. Judge, article « Trois grandes innées » (Cahier Théosophique n°156).
- William Q. Judge, article « Les Mahatmas – un idéal et un fait » (Cahier Théosophique n°156).
- R. Crosbie, article « Qu’est-ce qui se réincarne ? » (Cahier Théosophique n°181).
- William Q. Judge, article « Clairvoyance, intuitions, Adeptes » (Cahier Théosophique n°80).
- R. Crosbie, article « Instinct et intuition » (Cahier Théosophique 183).
- R. Crosbie, article « Homme visible et homme invisible » (Cahier Théosophique n°184).
- B.P. Wadia, article « Homme terrestre, divin, éternel » (Cahier Théosophique n°108).
- B.P. Wadia, article « Paraître comme rien aux yeux des hommes » (Cahier Théosophique n°108).
MÉDIATHÈQUE
Il est proposé :
Vidéo : « Réincarnation et idées innées » Voir la vidéo sur YouTube « Réincarnation et idées innées » (Chaine : La théosophie de Blavatsky)
Audio : Conférence « L’inné et l’acquis dans l’incarnation des âmes ». Écouter l’audio sur YouTube « L'inné et l'acquis dans l'incarnation des âmes ».