Traduction d'un extrait de l'article « Reincarnation of Animals » rédigé par W.Q. Judge et publié dans la revue The Path, avril 1894, sous le nom de plume « William Brehon ». N.B.― Dans le cours de ce texte, les notes et ajouts proposés par le traducteur pour la clarté de la lecture sont présentés entre crochets. Article publié dans le Cahier Théosophique n°170, © éditions Textes Théosophiques.
Si nous envisageons la question à la lumière des théories théosophiques, nous voyons qu'il existe une grande différence entre l'homme et les animaux. L'homme se réincarne comme homme, parce qu'il a atteint le sommet de l'échelle évolutive actuelle. Il ne peut retourner en amère car Manas (1) est trop développé. Il a un devachan parce qu'il est un penseur conscient. Les animaux ne peuvent avoir Manas (2) aussi développé et c'est pourquoi ils ne peuvent être soi-conscients dans le sens où l'est l'homme. En dehors de tout cela, le règne animal étant inférieur, il possède encore l'impulsion de s'élever vers des formes supérieures. Mais nous avons l'affirmation bien nette de la part des Adeptes, par l'intermédiaire de H.P. Blavatsky [H.P.B.], que, s'il est possible aux animaux de s'élever dans leur propre règne, ils ne peuvent plus, au cours de cette évolution, arriver au stade humain, car nous avons atteint le point médian, ou point tournant, de la quatrième Ronde (3). À ce sujet, H.P.B. a publié dans le second volume de la Secret Doctrine (première édition) une note au bas de la page 196, qui affirme : « Qualifier l'animal d'être 'sans âme', ce n'est pas priver une bête, de l'espèce la plus humble à la plus élevée, d'une 'âme', mais seulement d'une Âme-Ego consciente capable de survie, c'est-à-dire du principe qui survit à l'homme [terrestre] et se réincarne dans un autre homme. L'animal a un corps astral qui survit à la forme physique pour une courte période, cependant sa monade (animale) ne se réincarne pas dans la même espèce, mais dans une espèce supérieure, et naturellement n'a pas de 'devachan'. Il a en lui-même les germes de tous les principes humains, mais ils sont latents ».
Ici est faite la distinction décrite plus haut. Elle tient à l'Âme-Ego, c'est-à-dire à Manas avec Buddhi et Âtma (4). Ces principes étant latents dans l'animal, et, la porte du règne humain étant fermée, ils peuvent s'élever à des espèces supérieures, mais pas au stade de l'homme. Bien entendu, on ne veut pas dire ici qu’un chien, ou un autre animal, ne se réincarne jamais en tant que chien, mais que la monade a tendance à s'élever vers des espèces supérieures, quelles qu'elles soient, quand elle est allée au-delà de la nécessité de faire d'autres expériences en tant que 'chien'. Selon la position qu'assume l'auteur, il est naturel de supposer que la forme astrale de l'animal ne persiste pas longtemps, comme elle le dit, et par suite, que des manifestations astrales ou des apparitions d'animaux ne sont pas fréquentes. Et tel est bien le fait. J'ai entendu parler de peu de cas, mais vraiment peu, où un animal favori ait fait une apparition après sa mort, et même le champ fertile du spiritisme n'a que de rares exemples de ce genre. Mais ceux qui ont appris à connaître le monde astral savent que les êtres humains peuvent y revêtir la forme de l'animal ou de la chose à qui leur caractère les apparente étroitement ; et cette espèce d'apparition ne se limite pas aux morts : elle est plus courante parmi les vivants. C'est par de tels signes que les clairvoyants connaissent la vie et la pensée de la personne qu'ils ont devant eux. Ce fut sous l'action de cette loi que Swedenborg vit tant de choses curieuses de son temps.
L'objection qui se base sur le nombre immense d'animaux, morts et vivants, qui existent, et pour lesquels des monades à ce stade évolutif doivent être fournies, s'explique de la sorte. Bien qu'il soit affirmé qu'aucune nouvelle monade animale n'entre plus dans le règne humain, il n'est pas dit - et ce n'est pas sous-entendu- que l'entrée de monades nouvelles dans le règne animal ait cessé. Il se peut qu'elles proviennent d'autres mondes pour évoluer parmi les animaux de ce globe. Il n'y a rien d'impossible à cela, et cela nous donne une réponse à la question soulevée : d'où viennent les nouvelles monades animales, en supposant que toutes les monades actuelles aient épuisé le nombre total des espèces supérieures possibles ici ? Également, il se peut très bien que les monades animales soient entraînées vers d'autres branches de la chaîne terrestre en avance sur l'homme, dans le but de poursuivre leur développement nécessaire : ceci diminuerait le nombre de leurs apparitions sur terre. Car ce qui garde l'homme si longtemps ici c'est le pouvoir de sa pensée, qui est si grand qu'il crée pour tous un devachan d'environ quinze siècles, avec quelques exceptions et, pour certains qui désirent le 'ciel', un devachan d'une durée immense. Les animaux, toutefois, étant dépourvus d'un Manas développé, n'ont aucun devachan, et sont obligés de poursuivre leur marche en avant sur la planète suivante de la chaîne (5). Cela serait logique et utile, et leur donnerait la chance de se développer afin d'être prêts lorsque sonnera l'heure pour les monades de ce règne de s'élever au stade d'un nouveau règne humain. Elles n'auront rien perdu, mais, au contraire, y auront gagné.
William Brehon (W.Q. Judge)
Notes
(1) [Le principe pensant qui fait de l'homme un être responsable.] [retour texte]
(2) [État posthume subjectif de grande félicité où l'âme, libérée des contraintes terrestres, assimile le suc de ses aspirations spirituelles.] [retour texte]
(3) [Voir L'Océan de Théosophie, chap. III. L'évolution se déroule selon 7 grands cycles ou Rondes.] [retour texte]
(4) [Âtma et Buddhi, l'Esprit et son véhicule, forment la monade vivant dans chaque être.] [retour texte]
(5) [C'est-à-dire sur le « globe » suivant de la série des 7 « globes » de notre chaîne terrestre, dont la planète Terre est la seule partie visible à nos yeux. (Voir L'Océan de Théosophie, chap.III).] [retour texte]