Q. — J'ai entendu et lu beaucoup de choses au sujet des cycles et de leurs changements. Je crois à la loi des cycles, et aux grands et petits cycles, bien que je ne les connaisse pas. Mais sont-ils définis dans leurs limites, ou vagues et imprécis ?
R. — Beaucoup de ce qui a été dit sur le sujet est vague à l'exception de ce qui concerne le nombre d'années compris dans certains cycles. Le cycle lunaire et certains autres sont connus, mais il est bon d'éclairer certaines des obscurités. Bien des gens imaginent qu'un cycle donné commence, disons aujourd'hui, alors qu'un autre vient juste de se terminer. Mais cette vue n'est pas correcte, car les cycles s'interpénètrent, et, avant que l'un ne se soit vraiment achevé, l'autre a déjà commencé. La meilleure façon de le comprendre est de dessiner deux cercles en intersection, de la façon suivante :
Le cycle n° 1 se termine à l'intérieur du n° 2. Si on appelle B le point où commence le n° 2 on voit qu'il a son début pendant que le n° 1 se termine. Le véritable point correspondant à la fin de l'un et au commencement de l'autre se trouve probablement sur une droite verticale reliant les deux points d'intersection des cercles ; on peut alors appeler aube et crépuscule les espaces délimités de part et d'autre de cette droite.
Il y a aussi certains cycles importants qui commencent et finissent entièrement à l'intérieur des limites de cycles plus grands et, en fait, ce sont ces cycles plus petits que nous remarquons le plus, car ils sont ressentis plus rapidement. Tout ceci a trait aux cycles physiques ; il en existe d'autres, d'une nature plus élevée et plus spirituelle, très difficiles à repérer et à comprendre. On peut toutefois s'en faire une idée, jusqu'à un certain point, en observant un homme accomplir pendant plusieurs années une tâche qui, en soi, n'est pas particulièrement élevante : il arrive qu'à la fin de cette période son attitude mentale se soit métamorphosée au point de modifier toute la vie et le développement de l'individu. Dans ce cas, la tâche accomplie représentait un cycle d'avilissement ou d'expiation, mais, en même temps, un autre cycle, d'un caractère plus élevé, se déroulait dans la nature mentale et morale de l'homme, tout à fait à l'insu des autres, et peut-être aussi de lui-même. Il existe également des grands cycles cosmiques qui se déroulent lentement, de notre point de vue, parce qu'ils couvrent des périodes prodigieusement longues, mais néanmoins ils affectent puissamment l'humanité et les étudiants ne peuvent se les imaginer que faiblement.
L'ancienne civilisation égyptienne illustre le pouvoir de l'un de ces grands cycles qui s'est achevé depuis longtemps. Cette brillante civilisation a fleuri pendant une vaste période sans que sa gloire semble décroître, mais progressivement le changement se fit sentir. Nous pouvons imaginer les efforts effrénés et désespérés qu'ont dû faire ses sages pour enrayer cette décadence. Mais ils se révélèrent impuissants et l'Égypte sombra petit à petit pour atteindre le niveau où nous la voyons encore briller, grâce aux témoignages de son passé découverts jusqu'à présent, alors qu'elle était déjà sur son déclin ; et, finalement, tout ce qu'il en' reste se limite à des amoncellements de sable, et des Coptes ignorants et dégénérés.
Mais l'influence de ce puissant cycle s'est simplement déplacée vers d'autres sphères et, lorsque la Terre rencontrera à nouveau la même impulsion, l'ancienne civilisation ressurgira, la force de jadis revivra dans un corps meilleur.
Pour moi, les lois cycliques sont pleines d'espérance et suprêmement justes.
W.Q. Judge
[Article de W. Q. Judge – Cahier Théosophique n°144 – © Textes Théosophiques, Paris]