Sommaire
Le Soi immortel de l’homme
L’homme est adombré par le Soi Divin - « Vous êtes des dieux »
Une conviction commune à tout le genre humain
L’initié connaît le mystère du Soi Supérieur
Le Soi spirituel (Atman) : Dieu Unique et Suprême - L’âme non enchaînée au corps
Le Soi intérieur et karma
Le SOI : une même tradition mystique
Une dualité humaine : conscience et raison
La clairvoyance spirituelle
La manifestation inconsciente du Soi
« Où est DIEU ; Qu'est-il ? Qui a jamais vu l'ESPRIT immortel de l'homme, de façon à être certain de son immortalité ?
« C'est lorsque nous étions le plus anxieux de résoudre ces problèmes difficiles, que nous nous trouvâmes en rapport avec certains hommes, doués de pouvoirs si mystérieux et de connaissances si profondes, que nous pouvons véritablement leur donner le titre de Sages de l'Orient. Nous prêtâmes une oreille attentive à leurs enseignements. Ils nous montrèrent qu'en combinant la science avec la religion on peut arriver à démontrer l'existence de Dieu et l'immortalité de l'esprit humain, comme on démontre un problème d'Euclide. Pour la première fois nous reçûmes l'assurance que la philosophie Orientale n'admettait point d'autre foi qu'une foi absolue et immuable dans la toute-puissance du soi immortel de l'homme. On nous apprit que cette toute-puissance vient de la parenté de l'esprit de l'homme et l'Âme Universelle — Dieu ! Ce dernier, disent ces sages, ne peut jamais être prouvé qu'à l'aide du premier. L'esprit humain prouve l'Eprit Divin, comme une goutte d'eau démontre l'existence d'une source dont elle provient. Dites à celui qui n'aurait jamais vu d'eau qu'il existe un océan il vous croira sur parole, ou il refusera de l'admettre. Mais faites tomber dans sa main une goutte d'eau, et il se trouvera en présence d'un fait duquel il pourra déduire le reste. Après ça, il pourra par degrés, comprendre qu'il peut exister un océan sans borne et insondable. La foi aveugle ne sera plus nécessaire ; elle sera remplacée par la CONNAISSANCE. Lorsqu'on voit un homme mortel déployer des facultés prodigieuses, se rendre maître des forces de la nature, et entrouvrir aux regards le monde de l'esprit, l'esprit réfléchi est pénétré de la conviction que, si l'Ego spirituel d'un seul homme peut le faire, la puissance de l'ESPRIT-PÈRE doit être relativement aussi grande que l'océan qui surpasse la simple goutte d'eau en volume et en force. Ex nihilo nihil fit ; prouvez l'âme humaine au moyen de ses merveilleux pouvoirs et vous aurez prouvé Dieu ! » – Isis dévoilée, éd. Adyar, I, I, pp. 8 & 9 – Isis Unveiled, original ed., I, p. vi. [retour sommaire]
L’homme est adombré par le Soi Divin — « Vous êtes des dieux »
« L'expression "Vous êtes des dieux" qui, pour nos étudiants de théologie, n'est qu'une simple abstraction, a pour les Cabalistes une signification vitale. Chaque esprit immortel qui déverse son rayonnement sur un être humain, est un dieu – le Microcosme dans le Macrocosme, partie intégrante du Dieu Inconnu, la Cause Première dont il est une émanation directe. Il possède tous les attributs de sa source première, et parmi ceux-ci sont l'omniscience et l'omnipotence. Doué de ces attributs, et pourtant incapable de les manifester pleinement tant qu'il est dans un corps, où ils sont obscurcis, voilés et limités par les capacités de la nature physique, l'homme qui sert de demeure à la Divinité est capable de s'élever au-dessus de ses semblables, de mettre en évidence son savoir divin, et de faire preuve de pouvoirs divins ; car, tandis que le reste des mortels, autour de lui, ne sont qu'adombrés par leur SOI divin avec la possibilité de devenir plus tard immortels, mais sans autre certitude de gagner le royaume des cieux sinon par leurs efforts personnels, l'homme élu est déjà devenu immortel pendant son séjour ici-bas. Sa récompense est assurée. Dorénavant, il vivra pour toujours de la vie éternelle. […]
« Les anciens n'ont jamais entretenu la croyance sacrilège que ces entités perfectionnées étaient des incarnations de l'Un Suprême, du Dieu à jamais invisible. Aucune profanation de ce genre de la Majesté divine n'a fait partie de leurs conceptions. Moïse, ses types et ses anté-types n'étaient, pour eux, que des hommes parfaits, des dieux sur terre, car leurs dieux (leurs esprits divins) étaient descendus dans leurs tabernacles sanctifiés, autrement dit, leurs corps physiques purifiés. » – Isis dévoilée, éd. Adyar, II, pp. 173-174 – Isis Unveiled, original ed., II, p. 153.
« Cette croyance à la préexistence d'une race beaucoup plus spirituelle que celle à laquelle nous appartenons maintenant, peut être suivie en remontant les traditions les plus anciennes de presque chaque peuple. Dans l'ancien manuscrit de Quiché, publié par Brasseur de Bourbourg – le Popol Vuh[Partie III, ii, pp. 199-200] – les premiers hommes sont désignés comme appartenant à une race douée de la raison et de la parole, dont la vue était illimitée, connaissant, d'emblée, toutes choses. D'après Philon le Juif, l'air est rempli d'une multitude d'esprits, dont certains sont affranchis du mal et immortels, d'autres pernicieux et mortels. "Nous descendons des enfants d'EL et nous devons redevenir les enfants d'EL". La déclaration du gnostique anonyme qui a écrit l'Évangile selon saint Jean est claire : "À tous ceux qui L'ont reçu", c'est-à-dire à tous ceux qui pratiquent la doctrine ésotérique de Jésus, Il a donné "le pouvoir de devenir enfants de Dieu" [Jean, 1, 12]. Cette déclaration désigne la même croyance. "Ne savez-vous point que vous êtes des Dieux ?" [Jean, 10, 34] s'écrie le Maître. Platon décrit admirablement dans Le Phèdre, l'état antérieur de l'homme et ce qu'il redeviendra : avant et après la "perte de ses ailes" ; quand "il vivait parmi les dieux et qu'il était lui-même un dieu dans le monde aérien". Depuis les temps les plus reculés, les philosophies religieuses ont envisagé que l'Univers entier était rempli d'êtres divins et spirituels de diverses races. De l'une d'elles, dans le cours des âges, sortit ADAM, l'homme primitif. » – Isis dévoilée, éd. Adyar, p. 58 – Isis Unveiled, original ed., I, p. 2.
« Dès le moment où le premier mystique trouva le moyen de communiquer avec le monde des êtres invisibles, entre la sphère de la matière et celle de l'esprit pur, il conclut qu'abandonner cette science mystérieuse à la profanation des masses, serait la perdre. Son abus pourrait entraîner l'humanité à la destruction rapide ; ce serait laisser jouer des enfants avec des produits explosifs, et leur fournir des allumettes. Le premier adepte autogène n'initia que quelques élus, et garda le silence envers la multitude. Il reconnut son Dieu et sentit que l'Être sublime était au-dedans de lui. L’"Atman", le Soi (1), le puissant Seigneur et Protecteur, du moment que l'homme l'eût connu comme le "Je suis", le "Ego Sum", le "Asmi" [ou "Ahmi"], donne la preuve silencieuse de tout son pouvoir à celui qui était capable de reconnaître la "petite voix silencieuse". Depuis l'époque de l'homme primitif décrit par le premier poète Védique, jusqu'aux temps modernes, il n'y a pas eu un seul philosophe digne de ce nom, qui n'ait porté dans le silencieux sanctuaire de son cœur, la sublime et mystérieuse vérité. S'il était initié, il l'apprit comme une science sacrée ; s'il ne l'était pas, alors, de même que Socrate se répétait à lui-même et à tous ses semblables, la noble injonction : "Homme, connais-toi toi-même", il réussit à reconnaître le Dieu en lui. "Vous êtes des dieux", s'écrie le Roi-Psalmiste, et nous voyons que Jésus rappelle aux Scribes que l'expression "Vous êtes des dieux", s'adressait à d'autres hommes mortels, et qu'il réclamait pour lui le même privilège sans blasphème (Jean, X, 34-35). Et voici que Paul, écho fidèle, tout en affirmant que nous sommes tous "le temple du Dieu vivant" (2ème Épître aux Corinthiens, VI, 16), ajoute prudemment, qu'après tout ces choses n'intéressent que les "sages", et qu'il n'est pas "légitime" d'en parler. […]
(1) Ce "Soi" que les philosophes grecs nommaient Augoeides, le "Brillant", est décrit d'une manière impressionnante et vraiment belle dans le Véda de Max Müller. Démontrant que ce Véda est le premier livre des nations aryennes, le professeur ajoute que "nous y reconnaissons... une période de la vie intellectuelle de l'homme qui n'a pas son pareil dans aucun autre pays du monde entier. Dans les hymnes du Véda nous voyons l'homme abandonné à lui-même pour résoudre l'énigme de ce monde... Il invoque [les dieux autour de lui], il les loue et les adore. Et cependant avec tous ces dieux... au-dessus et au-dessous de lui le poète primitif parait être inquiet en son for intérieur. Là aussi, dans le fond de sa poitrine, il découvre une puissance... qui n'est jamais muette lorsqu'il prie, qui n'est jamais absente lorsqu'il craint et tremble. Elle paraît inspirer ses prières, et cependant les écouter ; elle semble vivre au-dedans de lui et, pourtant, le supporter et tout ce qui l'entoure. Le seul nom qu'il puisse trouver pour cette force mystérieuse est "Brâhman" ; car brâhman voulait dire originellement, force, volonté, désir et le pouvoir propulsif de la création. Mais ce Brâhman impersonnel, aussitôt qu'il est nommé devient quelque chose de grand et de divin. Il finit par devenir un des nombreux dieux, un dieu de la grande triade, qu'on adore jusqu'à ce jour. Et, malgré cela, la pensée au-dedans de lui n'a pas de nom véritable ; ce pouvoir qui n'est rien d'autre que lui-même, qui supporte les dieux, les cieux et chaque chose vivante, flotte devant lui, conçu mais non exprimé. Enfin il lui donne le nom "d'Atman", car Atman qui voulait dire à l'origine le souffle ou l'esprit en vient à signifier le Soi et le Soi seulement ; Le Soi, Divin ou humain ; le Soi, qu'il crée ou qu'il souffre ; le Soi, le un ou le tout ; mais toujours le Soi indépendant et libre. "Qui a vu le premier né, demande le poète, lorsque celui qui n'avait pas d'os (c'est-à-dire de forme) donne naissance à celui qui a des os ? Où était la vie, le sang, le Soi du monde ? Qui le demanda à celui qui le savait" (Rig-Veda, I, 164, 4). Cette notion du Soi divin, une fois exprimée, tout doit reconnaître sa suprématie ; le Soi est le seigneur de toutes choses, le Soi est le Roi de tout. Ainsi que tous les rayons d'une roue sont contenus dans le moyeu et la circonférence, toute chose est contenue dans ce Soi ; tous les sois sont contenus dans ce Soi" (Brihad âranyaka, IV, 5-15, éd. Roer, p. 487). Brahma lui-même n'est autre chose que le Soi (Ibid., p. 478 ; Chândogya-upanishad, VIII, 3, 3-4) ; Chips from a German Workshop, vol. I, p. 69.
« Nous le constatons dans le Codex, de même que dans les Védas, dans l'Avesta ; aussi bien dans l'Abhidarma, les Sânkhya Sûtras de Kapila que dans le Quatrième Évangile. Nous ne pouvons atteindre le "Royaume des Cieux" que si nous nous unissons indissolublement avec notre Rex Lucis, le Seigneur de Splendeur et de Lumière, notre Dieu Immortel. Il faut premièrement conquérir l'immortalité et "prendre le Royaume des Cieux par la force", qui est offert à notre être matériel. "Le premier homme, tiré de la terre, est terrestre ; le second homme est [le Seigneur] venant du ciel... Voici, je vous dis un mystère", dit Paul (I Corinthiens, XV, 47). Dans la religion de Sakya-Muni, que les savants commentateurs se sont plu, dernièrement à représenter comme purement nihiliste, la doctrine de l'immortalité est clairement définie, malgré toutes les notions Européennes ou plutôt Chrétiennes au sujet du Nirvâna. Dans les livres sacrés des Jaïns, de Pattana, Gautama Bouddha mourant est interpellé comme suit : "Monte dans le Nirvi (Nirvâna) de ce corps en décrépitude dans lequel tu as été envoyé. Monte dans ton séjour antérieur, O bienheureux Avatar !" Il nous semble que c'est tout l'opposé du Nihilisme. Si Gautama est invité à réintégrer son "séjour antérieur" et que ce séjour est le Nirvâna, il est donc incontestable que la philosophie Bouddhique n'enseigne nullement l'annihilation finale. De même qu'on prétend que Jésus apparut à ses disciples après sa mort, de même on croit, à ce jour, que Gautama redescend du Nirvana. Et s'il existe là-haut, cet état, n'est donc pas synonyme d'annihilation. […]
« Le Nirvâna signifie la certitude de l'immortalité personnelle dans l'Esprit, et non pas dans l'Âme, laquelle en tant qu'émanation finie, doit certainement désintégrer ses particules, composées de sensations humaines, de passions et du désir d'une existence objective quelconque, avant que l'esprit immortel de l'Ego soit complètement libéré et, désormais, certain de ne plus avoir besoin de recourir à une autre transfiguration sous quelque forme que ce soit. Et comment l'homme atteindrait-il cet état tant que l'Upâdâna, ce désir de vivre, de vivre toujours, n'a pas été effacé de l'être sensible, de l'Ahamkaratout revêtu qu'il est cependant d'un corps sublimé ? C'est "l'Upâdâna", ou le désir intense qui produit la VOLONTÉ, et c'est la volonté qui développe la force, et celle-ci donne naissance à la matière, ou l'objet ayant une forme. C'est ainsi que l'Ego désincarné, mû par ce désir immortel en lui, fournit inconsciemment les conditions de ses procréations successives dans des formes variées qui dépendront de son état mental et de son Karma, les bonnes et mauvaises actions de son existence antérieure, nommées généralement "mérites et démérites". Voilà pourquoi le "Maître" recommandait à ses mendiants de cultiver les quatre degrés de Dhyâna, le noble "Sentier des Quatre Vérités", c'est-à-dire l'acquisition graduelle de l'indifférence stoïque soit pour la vie soit pour la mort ; cet état d'auto-contemplation spirituelle pendant lequel l'homme perd complètement de vue sa double individualité physique, composée d'âme et de corps ; et par l'union avec son troisième soi supérieur et immortel, l'homme réel et céleste, se confond, pour ainsi dire, avec l'Essence Divine, d'où son propre esprit procède comme une étincelle du foyer commun. » – Isis dévoilée, éd. Adyar, II, pp. 355-359 – Isis Unveiled, original ed., II, pp. 317-320. [retour sommaire]
Une conviction commune à tout le genre humain
« Depuis l'Antiquité la plus reculée le genre humain, pris dans son ensemble, a toujours été convaincu de l'existence d'une entité spirituelle et personnelle dans l'homme physique personnel. Cette entité intérieure était plus ou moins divine suivant son degré de proximité avec la couronne. Plus cette union était intime, plus la destinée de l'homme était sereine, et moins les conditions extérieures étaient dangereuses. Une telle croyance n'est ni de la bigoterie ni de la superstition, mais un sentiment instinctif toujours présent de la proximité d'un autre monde spirituel et invisible, qui, bien que subjectif pour les sens de l'homme extérieur, est parfaitement objectif pour l'ego intérieur. De plus, ces hommes de l'Antiquité croyaient qu'il y avait des conditions extérieures et des conditions intérieures qui pouvaient influencer la détermination de notre volonté sur nos actions. Ils rejetaient le fatalisme, car le fatalisme suppose l'action aveugle de quelque pouvoir plus aveugle encore. Mais ils croyaient à la destinée ou karma que, de sa naissance à sa mort, tout homme tisse fil par fil autour de lui-même, ainsi qu'une araignée sa toile ; et, pour eux, cette destinée était guidée par cette présence que certains appellent l'ange gardien, ou au contraire, par l'homme intérieur astral qui nous est plus familier, mais qui n'est que trop souvent le mauvais génie de l'homme de chair, la personnalité. Ces deux réalités mènent l'HOMME, mais l'une d'elle doit nécessairement l'emporter ; et dès le commencement même de la lutte invisible, la loi de compensation et de rétribution, sévère et implacable, entre en jeu et accomplit son œuvre en suivant avec vigilance les péripéties du combat. Quand le dernier fil est tissé, et que l'homme paraît comme enveloppé dans le filet qu'il a lui-même ourdi, il se trouve alors complètement sous l'empire de cette destinée qu'il a lui-même créée. Celle-ci l'immobilise alors comme le coquillage inerte au rocher immuable, ou l'emporte comme une plume, dans un tourbillon que ses propres actions ont soulevé. » – Isis dévoilée, (Isis Unveiled, éd. originale II, p. 593, traduction Textes Théosophiques) [retour sommaire]
L’initié connaît le mystère du Soi Supérieur
« Les visions les plus sublimes et les plus véridiques sont obtenues, non pas par des extatiques naturels ou des "médiums", comme on l'affirme à tort quelquefois, mais au moyen d'une discipline régulière d'initiations graduées et du développement des pouvoirs psychiques. Les Mystes [initiés] étaient mis en contact intime avec ceux que Proclus nomme des "natures mystiques", des "dieux resplendissants", parce que, ainsi que le dit Platon, "nous étions nous-mêmes purs et immaculés, ayant été délivrés de ce vêtement qui nous entoure et qu'on nomme le corps, auquel nous sommes liés comme l'huître à sa coquille" (Le Phèdre, p. 64).
« C’est ainsi que, dans l'Inde antique, la doctrine des Pitris planétaires et terrestres n'était entièrement révélée, ainsi que c'est encore le cas de nos jours, qu'au dernier moment de l'initiation et seulement aux adeptes des degrés supérieurs. Nombreux sont les fakirs qui, bien que purs, loyaux et dévoués, n'ont jamais encore vu la forme astrale d'un pur pitar humain (un ancêtre ou père) autrement qu'au moment solennel de leur première et dernière initiation. C'est en présence de son instructeur, le Gourou, et juste avant que le Vatou-Fakir soit envoyé dans le monde des vivants avec sa baguette de bambou à sept nœuds pour toute protection, qu'il est mis, soudain, face à face avec la PRÉSENCE inconnue. Il la voit, et se prosterne aux pieds de la forme qui s'évanouit devant lui ; mais on ne lui confie point le grand secret de son évocation ; car c'est le mystère suprême de la syllabe sainte. Le AUM renferme l'évocation de la triade Védique, la Trimoûrti de Brahma, Vichnou, Shiva, suivant les Orientalistes (1) ; elle renferme, à notre avis, l'évocation de quelque chose de plus réel et de plus objectif que cette trinité abstraite – contredisant en cela, avec tout le respect qui leur est dû, nos éminents hommes de science. C'est la trinité de l'homme, lui-même, en voie de devenir immortel par l'union solennelle de son triple SOI intime – le corps grossier, extérieur, l'enveloppe n'étant même pas prise en considération dans cette trinité humaine (2). C'est lorsque cette trinité, anticipant sur la réunion triomphante au-delà des portes de la mort corporelle, devient pendant quelques secondes une UNITÉ, que le candidat est autorisé, au moment de l'initiation, à contempler son soi futur. C'est ainsi que nous devons l'interpréter dans le Desatir persan, en parlant du "Resplendissant" ; chez les philosophes-initiés grecs avec l'Augoeides – la "divine vision dont le siège est la lumière pure" lumineuse par elle-même ; et dans Porphyre lorsqu'il dit que Plotin fut réuni à son "dieu" six fois durant sa vie ; et ainsi de suite. »
« (1) Le Bouddha suprême est invoqué avec deux de ses acolytes de la triade théiste, Dharma et Sangha. […]
« (2) Le corps humain, son vêtement de peau est, par lui-même une masse inerte de matière ; seul, le corps vivant et sensible, au-dedans de l'homme doit être considéré comme son véritable corps, et c'est celui-là qui, avec l'âme-source ou corps astral pur, en contact direct avec l'esprit immortel, constitue la trinité humaine. » — Isis dévoilée, II, pp. 131-132 – Ed. Adyar – Isis Unveiled, original ed., II, pp. 113-115. [retour sommaire]
Le Soi spirituel (Atman) : Dieu Unique et Suprême – L’âme non enchaînée au corps
« Ce secret des secrets, que l'âme n'est pas enchaînée à la chair, était pratiquement démontré par les exemples des Yogis, les disciples de Kapila. Ayant libéré leurs âmes des liens de Prakriti [Matière], ou de Mahat [le Mental] (la perception physique des sens et de l'esprit – en un sens la création) ils développaient leur puissance d'âme et la force de leur volonté au point d'avoir acquis le pouvoir, sur cette terre, de communiquer avec les mondes supérieurs, et de pratiquer ce qu'on nomme communément des "miracles" (1). Les hommes dont l'esprit astral a atteint sur cette terre nehreyasa, ou moukti, sont des demi-dieux ; ils atteignent Moksha ou Nirvâna en l'état d'esprits désincarnés, et cela constitue leur seconde naissance spirituelle ».
(1) Voilà pourquoi Jésus recommande la prière dans la solitude de sa chambre. La prière secrète n'est rien d'autre que la paravidya du philosophe védantin : "Celui qui connaît son âme (son soi intérieur) se retire journellement dans la région de Swarga (le royaume céleste) dans son propre cœur", dit la Brihad-Arangaka. Le philosophe Védantin reconnaît l'Atman, le soi spirituel, comme le Dieu unique et Suprême. — Isis dévoilée, II, pp. 240-241 – Éd. Adyar – Isis Unveiled, original ed., II, pp. 565-566. [retour sommaire]
Le Soi intérieur et karma
« Ce fut encore la philosophie de Siddhartha-Bouddha que Pythagore enseignait, lorsqu'il disait que l'ego (νου̃ς) est éternel avec Dieu, et que l'âme traverse seulement différentes conditions (les Rupa-lokas hindous) afin d'atteindre la perfection divine ; cependant que le thumos retourne à la terre, et que même le phrên est éliminé. C'est ainsi que sa métempsychose n'est qu'une succession de disciplines à travers les refuges célestes (appelés par les Bouddhistes Zion) (1), pour se débarrasser du mental extérieur, et délivrer le nous du phrên, ou âme, le "Winyanaskanda" bouddhique, ce principe qui vit du Karma et des Skandas (groupes). C'est ce dernier, la personnification métaphysique des "actions" de l'homme, bonnes ou mauvaises, qui, après la mort de son corps, s'incarne, pour ainsi dire, et façonne ses nombreux composés invisibles et immortels en un corps nouveau, ou plutôt en un être éthéré, le double de ce que l'homme était moralement. C'est le corps astral des cabalistes et les "actions incarnées" qui forment le nouvel être conscient car son Ahamkara (l'ego, la soi-conscience) qui lui a été octroyé par le souverain Maître (le Souffle de Dieu) ne périt jamais, étant immortel per se en tant qu'esprit ; de là les souffrances du soi nouveau-né, jusqu'à ce qu'il se soit libéré de toute pensée terrestre, de tout désir et de toute passion. »
(1) C'est du Zion le plus élevé que viendra Maïtreya-Bouddha, le Sauveur à venir, en descendant sur la terre ; et c'est également de Sion que viendra le Libérateur Chrétien (Voyez l'Épître de saint Paul aux Romains, XI, 26). — Isis dévoilée, II, p. 321 – Éd. Adyar – Isis Unveiled, original ed., II, pp. 286-287. [retour sommaire]
Le SOI : une même tradition mystique
« Si nous étudions la question sans parti pris, nous reconnaîtrons aisément que l'éthique de Gautama-Bouddha, de Platon, d'Apollonius, de Jésus, d'Ammonius Saccas et de ses disciples, était basée sur la même philosophie mystique. Tous adoraient un seul Dieu, qu'ils L'aient considéré comme le "Père" de l'humanité, qui vit dans l'homme, comme l'homme en Lui, ou comme le Principe Créateur Incompréhensible ; tous vécurent des vies saintes. Ammonius, parlant de sa philosophie, enseignait que leur école datait du temps d'Hermès, qui tenait sa sagesse de l'Inde. C'était, en tout, la même contemplation mystique que celle du Yogi ; la communion du Brahmane avec son Soi lumineux – "l'Atman". Et ce terme hindou est cabalistique par excellence. Qu'est-ce que le "Soi" ? demande le Rig Véda ; "Le Soi est le Seigneur de toute chose... toute chose est contenue en ce Soi ; tous les Soi sont contenus dans ce Soi. Brahmân, lui-même, n'est autre chose que le Soi" (1), est la réponse. Idrah Rabbah nous dit : "Toutes choses sont Lui-même, et Lui-même est caché de tous côtés (2)." "L'Adam Kadmon des cabalistes contient en lui-même toutes les âmes des Israélites et il est lui-même dans chaque âme", dit le Zohar (3). Les principes fondamentaux de l'École Éclectique étaient par conséquent identiques aux doctrines des Yogis, les mystiques hindous, et du Bouddhisme primitif des disciples de Gautama. Et lorsque Jésus affirme à ses disciples que "l'Esprit de vérité que le monde ne peut recevoir parce qu'il ne Le voit point et ne Le connaît point", demeure avec eux et en eux, qui "sont en Lui et Lui en eux" (4), il ne fait qu'enseigner la même doctrine que nous reconnaissons dans toute philosophie qui mérite ce nom. »
(1) Chandogya-Upanishad, VIII, 3, 4 ; Max Müller, Veda.
(2) Idrah Rabbah, § 171.
(3) Introd. Zohar, pp. 305-312.
(4) Jean, 19,17.
Isis dévoilée, II, I, pp. 382-383 – Éd. Adyar – Isis Unveiled, original ed., II, pp. 342-343.[retour sommaire]
Une dualité humaine : conscience et raison
« La raison, qui met l'homme à même de maintenir sa suprématie sur les animaux inférieurs, et de soumettre la nature à ses besoins, est chez lui alliée à la partie physique de son être ; et c'est à sa partie spirituelle qu'est alliée la conscience, qui lui sert de guide infaillible au milieu des entraînements des sens ; car la conscience est cette perception instantanée, qui permet de discerner le mal du bien, et qui ne peut être exercée que par l'esprit, lequel étant partie de la Sagesse et de la Pureté Divines, est absolument sage et pur lui-même. Ses injonctions sont indépendantes de la raison, et ne peuvent se traduire en manifestations claires et nettes, que lorsqu'il n'est pas empêché par les attractions inférieures de notre double nature. » – Isis dévoilée, I, II, p. 19 – Éd. Adyar – Isis Unveiled, original ed., I, p. 305. [retour sommaire]
La clairvoyance spirituelle
« Il y a deux espèces de clairvoyance – celle de l'âme et celle de l'esprit. La clairvoyance des anciennes pythonisses, ou celle du sujet moderne magnétisé, ne différent que par les moyens artificiels employés pour provoquer la clairvoyance. Mais, comme les visions de chacun dépendent de la plus ou moins grande sensibilité des sens de leur corps astral, elles diffèrent beaucoup de la condition parfaite et omnisciente spirituelle ; car, le sujet ne perçoit, au mieux, que des lueurs de la vérité, à travers le voile interposé par la nature physique. Le principe astral, que les Yogis hindous appellent jîvâtmâ, est l'âme sensible, inséparable de notre cerveau physique, qu'elle tient en sujétion, et qui, de son côté, lui sert aussi d'entrave. C'est l'ego, le principe vital intellectuel de l'homme, son entité consciente. Pendant qu'il est encore dans le corps matériel, la clarté et la correction de ses visions spirituelles dépendent de sa relation plus ou moins intime avec son Principe supérieur. Lorsque cette relation est telle, qu'elle permet aux parties les plus éthérées de son âme essentielle d'agir indépendamment de ses particules plus grossières et de son cerveau, il comprend infailliblement ce qu'il voit ; ce n'est qu'à ce moment qu'il devient l'âme pure, rationnelle et super-consciente. Cet état est connu en Inde sous le nom de Samâddi; c'est la condition spirituelle la plus élevée qu'il soit donné à l'homme d'atteindre sur terre. Les fakirs cherchent à se mettre en cet état en retenant leur respiration pendant des heures entières au cours de leurs exercices religieux, et ils donnent à cette pratique le nom de dama-sadhâna. Les termes hindous Prânâyâma, Pratydhâra, et Dhâranâ ont tous rapport aux différents états psychologiques, et montrent jusqu'à quel point le sanscrit, et même la langue moderne hindoue se prêtent mieux à l'élucidation claire des phénomènes pour ceux qui étudient cette branche de la science psychologique, que les langues des peuples modernes dont les expériences n'ont pas encore amené l'invention de termes descriptifs spéciaux.
« Lorsque le corps est en état de dhâranâ – la catalepsie totale du corps physique – l'âme du clairvoyant peut se libérer et perçoit alors les choses subjectivement. Néanmoins, comme le principe conscient du cerveau reste toujours vivant et actif, ces images du passé, du présent et du futur, seront teintées de ses perceptions terrestres du monde objectif ; la mémoire physique et l'imagination viennent entraver la vision claire et nette. Mais l'adepte voyant sait comment s'y prendre pour arrêter l'action mécanique du cerveau : ses visions seront aussi nettes que la vérité elle-même, sans couleur, sans déformation, tandis que le clairvoyant, incapable d'exercer un contrôle sur les vibrations des ondes astrales, ne percevra au moyen de son cerveau que des images plus ou moins brisées. Le voyant n'est jamais exposé à prendre des ombres passagères pour des réalités, car sa mémoire étant aussi complètement assujettie à sa volonté que le reste de son corps, il reçoit les impressions directement de son esprit. Entre son soi objectif et son soi subjectif il n'y a pas d'intermédiaires gênants. C'est la véritable voyance spirituelle dans laquelle, suivant l'expression de Platon, l'âme s'élève au-dessus de tout bien inférieur. Nous atteignons alors "ce qui est suprême, ce qui est simple, pur inchangeable, sans forme, sans couleur ou sans qualités humaines : le Dieu – notre Nous."
« C'est cet état que des voyants tels que Plotin et Apollonius appelaient "l'Union avec la Divinité" ; que les anciens Yogis nommaient Isvara (1) et les modernes "Samâddi" ; mais cet état est autant au-dessus de la clairvoyance moderne que les étoiles sont au-dessus des vers-luisants. Plotin, le fait est bien connu, fut toute sa vie durant un clairvoyant ; et cependant il n'avait été réuni à son Dieu que six fois pendant les soixante-six ans de son existence, ainsi qu'il le confessa lui-même, à Porphyre. »
(1) Dans son sens général Isvara signifie "Seigneur" ; mais l'Isvara des philosophes mystiques de l'Inde veut dire précisément l'union et la communion de l'homme avec la Divinité des mystiques grecs. Isvara-Prasada veut dire littéralement en sanscrit grâce. Les deux "Mimansas" traitant des questions les plus abstraites, donnent l'explication de Karma comme le mérite, ou l'efficacité des œuvres ; Isvara-Prasada, comme la grâce ; et Shraddha, comme la foi. Les "Mimansas" sont l'ouvrage des deux plus célèbres théologiens de l'Inde. Le "Pourva-Mimansa" fut écrit par le philosophe Djeminy, et le "Outtara-Mimansa" (ou Vedanta) par Krichna Dvipayna-Vyasa, qui réunit ensemble les quatre "Védas". (Voyez Sir William Jones, Colebrooke et autres). » — Isis dévoilée, II, II, pp. 267-268 – Éd. Adyar – Isis Unveiled, original ed., II, pp. 590-591. [retour sommaire]
La manifestation inconsciente du Soi
« Les prophéties sont faites de deux manières – consciemment par des magiciens capables de lire dans la lumière astrale ; ou inconsciemment, par ceux qui agissent par ce qu'on nomme inspiration. C'est à cette dernière catégorie qu'appartiennent les prophètes Bibliques et les modernes voyants entransés. Platon était si familier avec ce fait, qu'il dit de ces prophètes : "Personne dans la jouissance de ses sens n'arrive à la vérité prophétique et à l'inspiration… sauf dans un état de démence à la suite de maladie ou de possession…" (par quelque daïmon ou esprit) [Platon, Timée, II, p. 563]. "Quelques personnes les appellent prophètes ; elles ignorent que ce ne sont que des portes voix… et qu'ils ne doivent point être qualifiés de prophètes, mais seulement de transmetteurs de visions et de prophéties", ajoute-t-il. »
Isis dévoilée, I, I, p. 275 – Éd. Adyar – Isis Unveiled, original ed., I, pp. 200-1.
« Heureux sont ceux qui, purs de cœur, repoussent inconsciemment les sombres esprits du mal grâce à cette pureté de leur nature intérieure. » – Isis dévoilée, I, I, p. 228 – Éd. Adyar – Isis Unveiled, original ed., I, pp. 488.
« Pour les Arhats [les Sages] le mot de jiva [la Vie ; la Monade ou la duade Atma-Buddhi] ne peut s’appliquer au Septième Principe, car ce n’est qu’à travers ses corrélations et son contact avec la matière que Fohat (l’énergie active dans le Bouddhisme) peut développer la vie consciente, et à la question “Comment l’Inconscient peut-il engendrer la conscience ?” La réponse est : “Est-ce la graine qui a engendré un Bacon ou un Newton soi-conscient ?” – H.P. Blavatsky article “The Sevenfold Principle in Man”, Collected Writings, III, p. 423. [retour sommaire]]