Les morts peuvent-ils communiquer ?

Les morts peuvent-ils communiquer ?

09 Avr, 2019

Depuis les années 1840, les spirites ont donné une réponse affirmative à cette question, et prétendent disposer de preuves suffisantes en faveur de la survie de l’intelligence après l’état qu’on appelle la mort. Mais le spiritisme n’est pas né d’hier. Il y a plus de cinq siècles, et dans tous les âges de l’humanité, on a pratiqué ce qu’on appelle [en Inde] le culte des bhûta, c’est-à-dire des « esprits » des morts. Le spiritisme d'aujourd'hui n’est que la répétition d’une erreur du passé, même si sa résurrection s’est produite parmi ceux qu’on pourrait qualifier d’intelligences supérieures, chez de « profonds penseurs » et des hommes de science. Les « communications » actuelles, comme celles qui ont eu lieu tout au fil des siècles, n’ont en elles-mêmes rien qui soit d’une nature authentiquement spirituelle ; elles sont physiques au dernier degré, comme en témoigne celle qu'a faite à Sir Oliver Lodge son fils Raymond (par l’entremise d’un médium, notez-le bien). Selon la déclaration de ce fils, sa vie après la mort est très semblable à celle qu’il a quittée : les gens y boivent, fument des cigares et, en fait ( ?), ils ont des cigares fabriqués pour eux, dans des « manufactures employant des esprits », avec des produits pour cigares appartenant à leur état de matière. Qu'il s'agisse là d'une communication « spirituelle », chacun est bien libre de le croire, mais elle tend seulement à montrer qu'après avoir quitté la vie physique, nous ne sommes pas nécessairement dans un état spirituel - comme on le suppose généralement.

Il s’agit de savoir ce que nous pouvons apprendre de telles « communications ». Y a-t-il, y eut-il jamais quelque chose en provenance de ce plan des communications spirites qui soit d’une quelconque utilité pour l’humanité ? Cette source nous a-t-elle jamais révélé quoi que ce soit du grand objectif pour lequel nous sommes ici-bas ? Nous instruit-elle du sens de la vie, ou de la raison de tant d'injustices apparentes dans le monde ? Nous informe-t-elle sur les guerres à venir, et le moyen d'éviter la menace de diverses grandes catastrophes ? Nous explique-t-elle la nature des rapports entre tous les êtres de ce monde, ou leur cause commune ?  Nous montre-t-elle la nature du devenir des êtres qui sont plus élevés que nous, ainsi que celle des êtres inférieurs ? Ou encore, pourquoi et comment ce système solaire est venu à l’existence, et quelles sont les lois qui le régissent ? Non, rien de tout cela. Ce sont là pourtant des sujets que nous aurions besoin d'élucider, mais nous ne disposons, comme base de réflexion à leur propos, que de toutes sortes de communications divergentes des soi-disant « esprits ». Ce sont justement ces divergences qui devraient nous faire comprendre qu'il n'existe dans ces régions aucune source de connaissance. Ce qu'il nous faut ce n'est pas ce que peut dire tel ou tel esprit, ou qui que ce soit d'autre, sur un sujet quelconque, mais c'est un exposé raisonnable, logique et juste présentant des lois que toute personne soit capable d'éprouver et vérifier par elle-même.

Considérons la façon dont la Théosophie expose comment l'homme est devenu ce qu'il est, l'histoire réelle de l'évolution, par des progrès acquis par l'observation et l’expérimentation, au cours des longs âges qui se sont écoulés. La base de cette évolution est la même dans chaque être humain, dans chaque cœur humain, dans chaque vie animale, dans chaque particule de matière : le même Esprit en tous, la même Vie Une, l’Unique Intelligence. Tous sont des rayons de cette Vie Une, de cette Intelligence Unique, et tous expriment les possibilités existant dans la Source Infinie. Les différences entre les êtres, les humains, les diverses races, révèlent toutes des degrés particuliers d’intelligence : chacun dispose en effet du même pouvoir que l’être le plus élevé, et du même pouvoir que tous les êtres ; c’est l’utilisation faite de ce pouvoir qui produit un instrument capable de le manifester plus ou moins complètement. L’Évolution c'est l’Esprit s'exprimant lui-même, que ce soit dans ce système solaire, ou dans ceux qui l’ont précédé. L’intelligence était présente, pendant la naissance de notre planète, dans sa condition de nébuleuse, ou de brouillard de feu ; et aussi bien, durant les processus de refroidissement et de durcissement qui se sont étendus sur de longues périodes. Dans toutes ces phases, comme dans toutes les substances liées à notre planète, nous aussi avons existé, en tant qu’êtres spirituels, et rien de tout cela ne nous a quittés aujourd’hui. À la fin de chaque existence, nous repassons par tous ces stades jusqu’au plus élevé, puis nous redescendons au niveau terrestre, afin de récolter les effets des causes mises en œuvre autrefois dans d’autres corps. La mort n’a en effet aucun pouvoir de transformation : l’arbre reste dans la position où il est tombé. C’est pendant la vie que nous devons reconnaître et éveiller notre nature authentique. La mort n’ouvre aucune porte vers la connaissance.

La preuve de ces divers états de conscience se révèle directement dans notre expérience nocturne. Lorsque nous dormons - bien qu’en fait nous ne dormions jamais - seul notre corps est endormi, et la conscience de ce plan physique nous a quittés. Nous n’avons plus aucune idée de ce qui arrive à nos amis, à nos proches ; nous n’avons pas la moindre perception de ce qui se passe où que ce soit sur la terre, alors que nous n’utilisons pas notre corps : c'est la « mort » - une petite mort, temporaire - pour ce corps. Puis nous passons dans un état complètement différent, connu comme l’état de rêve. L’âme humaine continue dans le rêve, en se connaissant comme celui qui est là, qui voit, sent, entend, parle, se déplace et accomplit toutes les autres choses qu’il fait dans son corps, lorsqu’il est éveillé. On disait autrefois que si l’on saisissait le gros orteil d’un dormeur, il se mettrait à vous parler. Vous obtiendriez ainsi une communication d’un « esprit », mais quel genre de communication ? La personne vous parlerait de ce que son propre mental était en train de considérer ; dans son état de rêve, elle n'en saurait pas plus que ce qu'il y a dans ses propres pensées personnelles, ses idées et activités personnelles.

Si on applique cette analogie à ce qu'on appelle le « moment de la mort », on peut comprendre qu’en réalité le moment de la mort n'arrive jamais. Nous finissons par abandonner notre corps, et il retourne à la terre dont il a été tiré ; mais nous ne sommes pas morts. Nous sommes toujours vivants. Nous restons conscients, sur d’autres plans et à d’autres niveaux, bien que nous n’utilisions ni le corps ni le cerveau. Mais quelle sorte de conscience, quelle sorte d'intelligence employons-nous alors ? Exactement la même que celle que nous avions lorsque nous étions dans le corps. Nos pensées, sentiments et désirs continuent pendant un certain temps, comme pendant l’incarnation, en raison de l’énergie que nous avions investie en eux. Comme cette énergie n’est pas renouvelée, elle finit par s’épuiser, et la personne - en tant qu’être spirituel authentique - entre dans un tout autre état, où nul être sur terre ne peut perturber l'action de son intelligence, ni la jouissance de sa béatitude. Comment pourrait-il s’agir d’un état de béatitude si, pendant un seul instant, l'entité pouvait y être troublée par les souffrances qu’elle a laissées derrière elle ici-bas ? Pourrait-il y avoir pire enfer pour l'âme d'une défunte que de voir, de son « paradis », s’apaiser trop vite le deuil d’un mari, et sa place de mère usurpée par une autre ? Il importe de comprendre que lorsqu'un être humain quitte l'existence physique, il passe par une condition ressemblant au rêve (avec des contenus multiples) pour finalement atteindre l'état le meilleur qu'il soit capable de réaliser. Il serait absurde de supposer qu’une entité humaine spirituelle puisse être perturbée par des agissements terrestres, car sa mission humaine s’est terminée au moment où elle a quitté cette terre. Mais elle reviendra dans un autre corps, pour reprendre une autre journée de travail. N’est-il pas évident que toute cette histoire de communications avec de soi-disant esprits ayant quitté leur corps n’est qu’une absurdité ?

N'allons pas imaginer qu'il n'y a que des êtres humains parmi les entités désincarnées, ou que les défunts, ou les morts-vivants, sont les seuls à exister de l'autre côté de notre monde physique. Il existe des myriades de sortes d’êtres qui ne vivent pas dans des corps semblables aux nôtres, mais qui peuplent des plans que les hommes traversent en quittant la terre. Toutes sortes d’êtres, des sous-hommes, ainsi que des élémentaux humains habitent des mondes contigus au nôtre. Peut-on imaginer qu’il soit désirable d’entrer en contact avec eux ? Et comment pouvons-nous jamais être sûrs qu’une quelconque communication extérieure n'établira pas un contact avec quelque esprit démoniaque aimant se travestir, en se revêtissant de restes ayant l'apparence d'un défunt - en raison de son attirance pour la nature et les désirs de ce défunt - et en s'en servant ainsi pour nous abuser ? Il faut une grande connaissance pour comprendre la nature réelle de l’homme : on ne l’acquiert pas par une quelconque « communication », mais en sondant notre propre nature. Le « Père dans le secret » réside en nous, et non à l’extérieur, et tout ce que nous savons, ou saurons jamais doit être trouvé en nous-mêmes et par nous-mêmes. Nous ne le trouverons jamais en le recevant des autres, ou d'aucune autre espèce d'esprit. L'Esprit de Dieu en tout être - le Connaisseur en chacun de nous - est le dernier recours, la plus haute instance, le dernier sommet que nous devions atteindre.

Pour le moment, nous sommes en train de cheminer ensemble à travers la matière de la terre ; lorsque nous quittons cette terre, nous la quittons seuls. De même, lorsque nous voyageons à travers la matière astrale, nous ne sommes pas à converser avec les habitants du plan astral, mais suivons notre propre trajectoire. Les états post mortem ne sont que les effets de notre dernière existence. Nous quittons le lieu de nos efforts pour venir récolter ce que nous avons semé - en rejetant le mauvais, dans un premier temps, puis en expérimentant nos aspirations les meilleures et les plus élevées. Dans tous ces états, chaque être est conscient d'être la même personne ; jamais, un seul instant, il ne lui vient à l’esprit, à la conscience, qu’il puisse être quelqu’un d’autre que celui qu’il était sur terre ; il ignore absolument qu'un événement comme la mort ait pu se produire. Dans son état le plus élevé, il se trouve en compagnie de tous ceux qu’il a aimés, dans les conditions mêmes qu'il aurait souhaitées pour eux. Il connaît sa béatitude, parce que l’équilibre entre les causes et les effets, même pour ses souffrances terrestres, est alors parfaitement ajusté pour l'esprit. Tous ces états sont en nous, et non au-dehors ; ce que nous y rencontrons, du début à la fin, et toujours, c'est nous-mêmes - d’abord, tels que nous pensons être, et finalement, tels que nous sommes réellement.

Il est impossible qu’une personne « décédée » communique avec une personne vivante, si ce n’est peut-être pendant la très courte période précédant le moment où l’individualité réelle rejette les idées qu’elle avait entretenues pendant la vie. Parfois alors, un désir très, très puissant de communiquer quelque chose effectuera une espèce de communication, mais, après la grande transformation connue comme la « seconde mort », toute relation avec la terre est interrompue. Il peut arriver qu'une personne vivante, à l’âme pure, élève sa propre conscience, par ses aspirations et son amour, jusqu’à un état céleste où elle a l’impression de parler, d'éprouver des sentiments et d'être en présence de ceux qu'elle a aimés, mais ces paroles et ces sentiments ne peuvent aucunement troubler l'être qui est à ce niveau. L’essence même de l'état spirituel exclurait toute perturbation, même si nous pouvons accéder aux sortes de sentiments qui existent dans cette condition. Tout ce qu’un médium peut obtenir, ce sont les simples réflexions et répétitions de ce qui s’est produit, et se trouve enregistré dans la nature des assistants. Un médium décrira l’état post mortem d’une personne comme très vivante, ce qui devrait montrer à quel point le médium peut être sujet à la méprise et à l'erreur. Dans l'état passif où il se trouve, il ne peut rien contrôler ; il ne fait que fournir un canal par lequel certaines choses peuvent arriver, ou « transpirer ».

La plupart des interlocuteurs « spirituels » des médiums sont des suicidés et des victimes de morts « accidentelles ». Car il n'y a pas toujours mort quand le corps cesse de vivre. À moins que cette fin ne coïncide avec l'expiration de la durée de vie, qui est déterminée dès la naissance, l’homme reste relié à la terre jusqu’à l'échéance de ce terme.

Mais il existe des cas de communication avec des êtres de l'univers - situés presque aux limites de notre monde - qui ne sont pas dans des corps physiques, mais qui vivent et se meuvent sur un autre plan de substance très, très loin de tout rapport possible avec un médium ordinaire. On les appelle les Nirmânakâya. Ce sont des hommes qui, par le degré de perfection qu'ils ont atteint pourraient, s'ils le souhaitaient, accéder à l'état de béatitude le plus élevé, et y demeurer, mais qui y renoncent, car cela impliquerait d'abandonner à jamais toute chance d'aider leurs semblables. Lorsqu'une personne est sincère et a des aspirations élevées, ils peuvent, si nécessaire, communiquer avec elle, afin de l'aider. Mais il n'y a aucune confusion possible à propos de ces communications : elles sont personnelles et destinées à cette personne, comme une aide directe. C'est ce qui est à l'intérieur de nous qui induit l'aide extérieure que nous pouvons recevoir. C'est la reconnaissance de la nature spirituelle de notre être, et de tous les êtres, qui en constitue la véritable condition. C'est du spirituel que provient toute force authentique. Et c'est pour le perfectionnement de l'humanité qu'ont œuvré toutes les Incarnations Divines.

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